Quand on vous disait, l’année dernière, que l’avenir était « incertain et mortifère », on ne se trompait pas. Eh oui, l’avantage de la Résignation, c’est de ne plus jamais être surpris de rien. Et puis, pour les genres qui, en art, sont attirés par tout ce qui est déprimant, eh bien, il faut le dire, 2020 fut une année particulièrement inspirante et intéressante. Comme on vous le prouve avec notre traditionnel anti-bilan, où on se concentre sur les sorties indés de l’année qui, loin de trouver leur efficace sur un dancefloor consumériste, et alors même qu’elles étaient cloîtrées entre quatre murs, se sont plutôt attelées à explorer l’infinité de leurs intériorités.

20. Goodbye Meteor – Northtape [demo], 5 juillet (Hauts-de-France)

Une première démo de trois titres post-rock qui nous amènent dans les douces plaines de Normandie. Les instruments dialoguent harmonieusement, jouent avec les silences pour mieux mettre en avant les passages plus énergiques ou ils se rejoignent tous.
Des mélodies qui invitent à s’allonger dans un champ et s’adonner à de plaisantes rêveries en regardant les étoiles.

Alex Trauty

19. NGC2020 – NGC2020 EP, 1er décembre (Paris //France)

A l’heure actuelle, on ne sait pas encore qui se cache derrière ce mystérieux matricule de « NGC2020 ». Le premier EP du groupe apparemment basé à Paris nous propulse dans une sorte de dystopie électronique, où les machines font sonner le post-rock, où le numérique fait vibrer l’ambient. Alors, NGC2020, est-ce une effrayante IA, une nébuleuse cosmique, ou une nouvelle Nintendo Game Cube ? FeV mène l’enquête.

Titre préféré : Tomorrow

Pep

18. Pam risourié – Noctessa, 29 mai (Paris //France)

Le deuxième EP des Parisiens de pam risourié est encore bon. Noctessa est comme son nom l’indique, plus nocturne que son prédécesseur, plus intime aussi peut-être, et a su marquer les sorties shoegaze de l’année par ce qui nous semble être un bon sens du songwriting.

Titre préféré : Night Flowers

Pep

17. POPULATION II – A la Ô Terre, 30 octobre (Montréal //Québec)

Troisième sortie officielle du trio montréalais, A la Ô Terre est puissant, surprenant fuzzy et incroyablement trippant. Avec cet album, population II nous rappelle au bon souvenir de Hawkwind, Fuzz et Color Haze. Un voyage psychédélique qui nous met sur orbite, histoire de quitter pour pendant 42 minutes une terre se résumant pour certain à quatre murs. Le tout en français.

Titre préféré : Introspection

Manas

16. Double Date With Death – L’Au-Delà, 10 janvier (Montréal //Québec)

Également montréalais, également francophone, également un troisième effort, L’Au-Delà est l’album nervoso du top. Aussi fiévreux qu’une grippe à couronne, l’album nous fait twerker dans notre deux pièces miteux de l’est montréalais. Si je pouvais avoir un date tout court je serais content, mais un double date avec la mort, là je signe direct : elle m’emmènerait dans cet Au-Delà beaucoup plus vivant que le monde des…vivants.

Titre préféré : Copier-coller

Manas

15. Sinaïve – Dasein EP, Buddy Records, 23 octobre (Strasbourg //France)

A vrai dire, Sinaïve, c’est un groupe qui sonne très français. En écoutant cet habile mélange de références extrêmement différentes (pop, shoegaze, black, chanson française) et ces lyrics, on se croirait presque sur les bancs du Café de Flore une clope à la main et tout l’attirail requis, pour méditer de l’influence de Gainsbourg sur le DSBM. C’est donc un grand oui.

Titre préféré : Syndrome de Vichy

Pep

14. Montagne – Black Waterfall, 4 septembre (Paris //France)

Premier album de Montagne, qui nous avait déjà fait l’honneur de deux EP qu’on avait adorés. Au fil du temps, le son du groupe a évolué, incorporant de plus en plus de chant. On y retrouve cependant toujours ces riffs de guitares acérés intégrés dans un son teinté de reverb. Ce premier album confirme tout le bien qu’on pensait du trio parisien.

Alex Trauty

13. Brusque – What’s Hidden Devours, 3 avril (Paris //France)

Le premier ep de Brusque, duo parisien qu’on ne présente plus par ici, est enfin arrivé cette année. Impossible pour nous de ne pas le faire figurer ici. Un son gras, lourd et abrasif à te plaquer au sol, à la fois doom et progressif, avec un chant chargé en désespoir qui sait être autant screamo et guttural que clean, pur et intelligible.
Qui plus est, Brusque a invité une foule de guests. De quoi donner de la diversité à l’ep, et un petit effet de « scène » très appréciable.

Titre préféré : Red State

Pep

12. Cloudkicker – Solitude, 4 septembre (USA)

Avec Solitude, Cloudkicker délivre un poignant témoignage musical du premier confinement. Aux guitares plus entrelacées et telluriques que jamais se marient des harmonies célestes et cristallines. Notre faiseur de tempête conjure la solitude de la plus belle façon possible : en faisant tournoyer autour de nous un ouragan qui nous invite au plaisir d’être chez soi.

Malfilatre

11. Smokes – Our Power, 3 avril (Montréal //Québec)

Allez on sort les mouchoirs car l’album (un troisième album encore !) n’est pas joyeux, les violons sont là pour en témoigner. La formation montréalaise nous distille une musique mélancolique, éthérée et diablement originale, qui nous rappelle les meilleurs moment de Bark Psychosis. Définitivement inclassable, il est difficile de poser des mots sur Smokes sans que ces derniers partent en fumée.

Titre préféré : Complaining

Manas

10. Luge – Luge, 24 avril (Toronto //Canada)

Luge porte bien son nom. En écoutant ce deuxième – et éponyme – album du band de Toronto, et sa no-wave à base de structures mathy (versant heureux du genre) et de sons twee pop bien rigolos, on se revoit un peu étant gosse, sur sa pelle à neige en train de dévaler les petites buttes enneigées du square tout en se sentant badass.

Titre préféré : up & up (& up)

Pep

9. Fer Sher – Identical Triplets, 24 novembre (Montréal //Québec)

Découvert sur Radio Tempête, ondes 100% femmes, personnes trans et non binaires, les montréalais.e.s de Fer Sher nous envoûte dans son math-rock transatlantique. De la joie d’entendre une voix qui nous donne envie à la fois de brûler des poubelles et de pleurer. Promis, après le confinement, on sera en front row.

eva camping

8. Cosse – Nothing Belongs to Anything, Grabuge Records, A tant rêver du roi, 2 juin.

On a découvert Cosse en première partie de Lysistrata dans le monde d’avant et on avait déjà pris une bonne claque. L’EP ne sous a vraiment pas déçus. Les cinq morceaux distillent des riffs sinueux, jouant avec la tension, et des rebondissements qui captivent l’écoute des 27 minutes que dure Nothing Belongs to Anything.

Alex Trauty

7. Adrianne Lenker – Songs, 4AD, 23 octobre.

Échappée de l’excellent (et très Pitchfork-compatible) groupe Big Thief, auquel on doit déjà l’admirable combo UFOF / Two Hands paru l’an dernier, Adrianne Lenker revient en ces heures sombres avec le sobrement intitulé songs, écrit et enregistré en un mois dans une cabane du Massachussetts. Et attention, spoiler-alert : c’est toujours aussi triste. Perdue quelque part entre le Nick Drake de Pink Moon et le Bruce Springsteen de Nebraska, Adrianne Lenker trace sa route avec un album minimaliste et touchant, bande-son parfaite pour s’endormir en pleurant dans sa bière, ou marcher sous la pluie pendant le (2e, 3e… enfin bref, un autre) confinement.

Titre préféré : Two Reverse

Will Mara

6. La Houle – Dehors au Dedans,

Quand La Houle a sorti Dehors au-dedans, un EP ambient, en plein de confinement, ça a été une bouffée d’air bien appréciée. Inspiré des tableaux de paysages côtiers peints par son grand-père, Simon, l’homme derrière La Houle a réussi a retranscrire l’ambiance qui s’en dégageait avec succès.

Alex Trauty

5. Worhs – Plus dure sera la chute, autoprod, février 2020 (Paris //France)

Une immersion dans les pensées les plus sombres, qui prennent corps à travers un black metal progressif par la longueur des morceaux et leur structure. Les paroles sont teintées de cynisme, et soutenues par cette musique brute, instauratrice d’un chaos libérateur.

Alex Trauty

4. Crack Cloud – Pain Olympics, Meat Machine, 17 juillet (Vancouver //Canada)

Citer Crack Cloud dans un top n’est déjà plus vraiment original. Et pourtant, le collectif de post-punk originaire de Vancouver n’en est pas moins hyper créatif, original et incroyablement trippant. Et s’il donnait déjà un nouvel élan au post-punk en 2018 avec son premier album, Pain Olympics, quant à lui, avec son univers steam punk plus développé, semble bien donner au genre son épopée.

Titre préféré : Tunnel Vision

Pep

3. Jesu, Terminus, 13 Novembre, Avalanche Recordings (UK)

Probablement le sauveur de cette année 2020, Jesu se pose en patron de la nostalgie et en roi de l’incertitude. Ok Terminus ne propose rien de neuf dans une discographie plus longue que la liste des projets de Zach Hill mais Justin parvient toujours à me faire fondre avec son post-metal sensible et son autotune de rappeur. Terminus, personne ne descend.

Titre préféré : When I Was Small

Manas

2. P’tit Belliveau, Greatest Hits, 27 mars (Moncton, Nouveau-Brunswick)

La meilleure chose de tous les temps.

Titre préféré : Tout

Manas

1. FUUDGE, Fruit-Dieu, 31 janvier 2020 (Montréal //Québec)

Avec son gros son à la Nirvana qui soigne ta nostalgie d’une époque que tu n’as pas connue et son nom en capslock qui pète les yeux, FUUDGE c’est un peu ce pote beaucoup trop enthousiaste sur les nineties et qui parle trop fort dans les partays. Seulement ce pote il cuisine super bien la salade de fruit. Son ingrédient secret ? Le Fruit-Dieu.

Ce qui lui a valu l’honneur d’être à cette place, devant même jésu(s).

Titre préféré : Le goût de ta chair

Manas