« Tout est magnifique » disait Jacques. « Ouai » répond Stéphane, une bière à la main, très probablement sur la même longueur d’onde mais trop flemmard pour s’ériger en prédicateur comme ce-dernier. Ouai Stéphane a 27 ans, il vient d’Antibes (… en gros, c’est en France), il a sorti sa première pièce de musique, le Ouai EP, l’été dernier, et il fait de la bonne grosse techno des familles. Altruiste dans l’âme, celui-ci est mu par une véritable et remarquable philosophie : il prétend vouloir faire de la musique pour tous les Stéphanes. Tous. Pas d’exception possible. Son Facebook est un véritable temple pour les Stéphanes. De Bern à Plaza, il y a des photos d’un Stéphane par-ci à l’arrêt de bus, d’un Stéphane par-là dans le métro… tous y ont bien leur droit d’asile : la preuve, il y a même le cliché d’un Stéphane en costard en mode « je travaille à la Défense »…
Mais assez parlé philosophie. Maintenant, parlons gros son, sciences et musicologies. La presse l’appelle le « nouveau Jacques » pour le présenter au grand public, déjà fou de lui. En effet, Ouai Stéphane nous immerge dans un univers loufoque et DIY assez semblable à celui de Jacques, qui s’est fait connaître en faisant de la musique à partir d’objets improbables (hop petite vidéo). Ainsi, comme lui, sur scène, Ouai Stéphane fait de la musique à partir d’une bière, d’une horloge, et de beaucoup d’autres technologies trafiquées par ses soins, notamment une main de mannequin assez géniale qui, par magnétisme, émet du son lorsque qu’il place sa propre main au dessus d’elle. L’effet produit : l’impression d’être projeté quelque part entre le labo d’un savant fou et une chambre d’ado.

Mais la nuance qu’il convient d’apporter dans la comparaison avec son confrère à la tonsure, c’est que de DIY, Stéphane n’a pas seulement le goût de la bidouille : il en a aussi l’esprit, l’attitude. Car il nous baigne en plus dans une permanente et délicieuse auto-dérision. Et ça fait toute la différence. En témoigne son excellent clip (pourtant très bas budget) qu’il a apporté au morceau très bien nommé « Ouai ». On y voit un homme plutôt colossal – un Stéphane ? – tenir un bocal à poisson rouge devant un escalator parisien qui monte à l’infini, quand retentit une techno lourde, des synthés acides et des kicks assourdissants, sur fond d’un long drone coloré qui nous fait littéralement entrer dans une dimension alternative, hilarante et magique.
Ça y est, il vous dit quelque chose ? Vous remettez enfin Antibes sur une carte ? C’est peut-être parce qu’en plus de sa présence dans deux showcases privés donnés respectivement en avril et en mai au Pop-up du Label et à L’International à Paris, il a aussi fait une performance remarquée au Château de Chambord pour nul autre que Cercle (vous savez, cette chaîne YouTube qui organise des DJ-sets dans des lieux clinquants et resplendissants <3). Enfin, on sait plus nous, le titre de la vidéo est passé de « Cercle » à « Enfin Miniature ». On est perdu… En tout cas, ça vous donnera une idée de la manière dont il procède sur scène !
Et voilà, on a peint Stéphane. Un producteur hors norme qui, en parfaite humilité, réussit le tour de force de nous faire vivre une expérience exceptionnelle, où le simple, le loufoque et la vieille blague de bistrot n’ont jamais été aussi magnifiques. Soit dit en passant : entre Jacques et Ouai Stéphane, Fort et Viril a fait son choix.