Sorti en 2004, Rip it up and start again est un livre de Simon Reynolds retraçant les heures de gloire du post-punk (1978 – 1984). Loin des ouvrages universitaires pompeux et de la superficialité de certains écrits journalistiques, « Déchire tout et recommence » s’impose comme la bible pour les fans du genre et comme une fantastique porte d’entrée pour les curieux et les néophytes.

Non seulement, Reynolds détaille l’aspect musical de chacun des groupes mentionnés (production, parole, arrangements) mais également les éléments politiques et sociaux entourant chaque albums. A l’aide d’un travail de recherche minutieux appuyé par des interviews et par une collecte d’archives de presses, Reynolds propose une analyse politique et sociologique du genre. On y apprend notamment que Devo se réclamait du post-modernisme, que le premier label de rock indépendant (Rough Trade) était plus proche d’une coopérative Maoiste que d’une véritable entreprise, et, que les trublions de Throbbring Gristle avait créé une secte aux principes nietzschéen et que les musiciens londoniens se réclamaient de la philosophie de Gramsci, de Marx et de Wittgenstein.

En soulignant le caractère incroyablement engagé du Post-Punk (résolument féministe, postmoderniste, marxiste et intellectuel) Reynolds offre un outil de compréhension de l’éthique Do It Yourself si cher aux musiciens d’aujourd’hui. Le rôle des labels, de la presse, de l’environnement politique et urbain, de l’histoire personnelle des musiciens sont également évoqués avec précision, offrant ainsi une lecture totale du phénomène Post-Punk. Quant à la question existentielle qui anime de nombreux mélomanes  » Le post-punk est-il du punk pour intellos prétentieux?  » la réponse se trouve dans ce livre (spoiler : Oui).

Plus qu’un ouvrage permettant de découvrir de nouveaux groupes et de vivre des années que l’on a pas connu , Rip It up nous pousse à une réflexion de haut niveau sur le sens que l’on donne à une œuvre musicale.

Ce livre est une merveilleuse occasion pour les fans du genre de découvrir des groupes plus confidentiels ou de mieux comprendre leurs albums favoris. C’est aussi une formidable introduction aux sciences humaines, à la philosophie politique et au cultural studies, tant les références de Reynolds en la matière sont savamment utilisées. Finalement Rip it Up brille par une écriture d’une incroyable fluidité, le propos est sérieux mais évoqué avec passion et légèreté, les anecdotes sont croustillantes sans jamais tomber dans le puteaclic.

Une vraie leçon de journalisme professionnel.